Le 15 novembre 2022

Utilisation des biosimilaires des anti-TNF alpha en France

Utilisation des biosimilaires des anti-TNF alpha en France : une étude à partir des données du SNDS

Contexte

Les biothérapies ont révolutionné la prise en charge des pathologies dysimmunitaires et inflammatoires chroniques, maladies dont la prévalence est relativement élevée. Ces biomédicaments sont très largement utilisés en dermatologie (psoriasis en plaques, hidradénite suppurée), rhumatologie (polyarthrite rhumatoïde, arthrite juvénile idiopathique, rhumatisme psoriasique, spondylarthrite ankylosante), gastroentérologie (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique) et ophtalmologie (uvéite). Les principaux biomédicaments utilisés dans ces pathologies sont des anticorps monoclonaux ou des protéines de fusion. L’arrivée à échéance des brevets des premières biothérapies a permis la commercialisation de traitements biosimilaires, c’est-à-dire similaires au médicament de référence mais non strictement identiques du fait du processus de production. Les produits biosimilaires partagent la même séquence en acides aminés que le médicament de référence, et sont moins onéreux.

 

En France, les anti-TNF alpha étant entièrement remboursés et largement utilisés, l’utilisation des biosimilaires constitue un enjeu particulièrement important: à ce jour, trois anti-TNF-alpha ont un biosimilaire sur le marché, l’infliximab depuis janvier 2015, l’etanercept depuis mai 2016 et l’adalimumab depuis octobre 2018. Il convient de noter que la prescription initiale et le renouvellement annuel des anti-TNF-alpha sont effectués au niveau hospitalier, ainsi que la délivrance pour l’infliximab, mais que la délivrance de l’etanercept et de l’adalimumab est effectuée par les pharmaciens d’officine en ville. Depuis 2021, le renouvellement annuel hospitalier n’est plus nécessaire pour les anti-TNF-alpha, seule est maintenue la première prescription hospitalière

 

Méthode

Dans une étude descriptive longitudinale, nous avons évalué les taux de pénétration des biosimilaires (proportion d’utilisation du biosimilaire par rapport à l’utilisation totale de la molécule) de l’infliximab, de l’etanercept et de l’adalimumab en France en utilisant les données du Système National des Données de Santé (SNDS).

 

Résultats

Un total de 216 729 patients (dont 112 055 nouveaux utilisateurs et 104 674 utilisateurs en cours de traitement à partir de la date de commercialisation du premier biosimilaire de chaque molécule en France) ont été inclus dans l’étude et suivis jusqu’au 31 décembre 2021. Les utilisateurs (initiateurs ou non) d’anti-TNF alpha en 2021 ont également été décrits afin d’obtenir l’information la plus récente concernant le niveau d’utilisation des biosimilaires des anti-TNF alpha en France.

Les biosimilaires représentaient respectivement pour l’infliximab, l’etanercept et l’adalimumab, 78%, 46% et 54% des initiations sur toute la période d’étude, et respectivement 94%, 67% et 59% des initiations en 2021. Par ailleurs, respectivement 48%, 20% et 18% des utilisateurs de produit de référence avaient changé pour un biosimilaire au cours du suivi. Une part non négligeable de patients passait du produit de référence au biosimilaire puis de nouveau au produit de référence (près d’un tiers des switcheurs selon les cas). Nous avons également pu observer des switchs entre biosimilaires d’une même molécule, essentiellement pour l’infliximab. Par conséquent, en 2021, les biosimilaires représentaient au total 82%, 41% et 39% des utilisateurs d’infliximab, etanercept et adalimumab.

Le taux de pénétration des biosimilaires était beaucoup plus élevé pour l’infliximab que pour les autres anti-TNF alpha, en raison de son mode de délivrance en milieu hospitalier, le processus d’achat par marchés publics favorisant l’utilisation des produits biosimilaires. L’initiation par un biosimilaire et le passage du produit de référence au produit biosimilaire ont suivi une croissance plus rapide et importante dans les pathologies rhumatologiques (polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante et rhumatisme psoriasique) que dans les autres pathologies inflammatoires: gastro-entérologie (maladie de Crohn et rectocolite hémorragique) et dermatologie (psoriasis et hidradénite suppurée). L’utilisation des biosimilaires était semblable quelles que soient les caractéristiques socio-démographiques des patients, notamment l’âge, le sexe, l’indice de défavorisation de la commune de résidence ou l’affiliation à la CMUC ; certaines disparités régionales dans l’évolution des initiations par un biosimilaire des anti-TNF alpha ont pu être mises en évidence, avec un usage moindre des biosimilaires dans les DOM-TOM ou en Corse.

 

Conclusion

Le taux d’initiation des biosimilaires des anti-TNF alpha a augmenté rapidement dès leur arrivée sur le marché, avec une bonne adoption des biosimilaires de l’infliximab, et une dynamique d’utilisation des biosimilaires de l’adalimumab qui a bénéficié de l’expérience de l’etanercept, mais il reste encore une marge de progression. Par ailleurs, le taux de passage du produit de référence au biosimilaire est resté modéré. En conclusion, cette étude souligne la nécessité et l’utilité de politiques d’incitations à la prescription de biosimilaires et d’un suivi régulier de leur utilisation.

Téléchargement du rapport d'étude

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